(février 2002)


Il y a quelque chose que je sens, nouveau, qui est à faire. Que je veux faire. Je ne sais pas encore bien quelle forme cela prendra. Je ne sais pas encore bien si j'y parviendrais, si cela descendra dans mes actes, mon écriture… et comment cela descendra. Mais je le pressens. Je trouve cela peu à peu.
C'est clair que ce que je pressens en poésie ne s'est pas encore ouvert. Ou plutôt — plus que d'attendre que « ça » s'ouvre et vienne de soi-même —, je ne l'ai moi-même pas encore ouvert.
Oui c'est faire descendre l'énergie directement dans la parole (et l'énergie « de » la parole elle-même). Réintégrer la vision. Quelque part se foutre du résultat, du style. Je pressens la forme sauvage qui intégrera cette énergie (celle de la vision, de la parole en elle-même, des mondes, des paysages des mondes, des grandes et petites choses, des grandes et petites gens, de tout !…) mais je ne l'ai pas encore.
Pourtant ça pousse, ça pousse derrière !

Ce que je trouve petit à petit c'est une chose où le mot n'est plus outil, mais un réceptacle, un média, au sens de lieu de passage de flux, lieu « habité » de flux… passage de visions, de sensations, de grouillements de toutes les particules et de toutes les énergies qui nous traversent, nous poussent, nous tiennent debout… nous, et plus largement, le cosmos, nous dans le cosmos…
Ces mots, cette forme qui contiennent tout ce que j'ai à dire, tout ce que je vois, et, encore plus, plus largement, tout ce que je pressens… Mais qui ne contiennent pas seulement comme des réceptacles, mais véhiculent, emportent, révèlent, médiatisent ces flux, ces flots…
(comme les "gros" mots de [ Caps 2, chargés, énergie, explosifs, moteurs)

C'est descendre dans ce brouhaha — et cette énergie — où il y a tant de silence.

Je crois qu'on ne peut faire quelque chose dans ce domaine sans inventer, sans trouver quelque chose de nouveau.
Ce quelque chose qui trouvera, transmettra, fera passer, diffusera la vibration, l'énergie, qui, dans les choses les éléments les particules les bêtes les gens les attitudes les sentiments, est contenue, latente, et pourtant vibre vraiment — comme les flux électriques excitant l'atome, animant la matière — n'attendant qu'à exploser et fleurir.
Et c'est de là qu'il faut partir, depuis le centre, depuis le fond. De là, ensuite, pousse l'écriture. Fleurit.

Ces temps-ci je suis dans mon écriture. Beaucoup. Je ne sais pas ça vient c'est presque monstrueux. Il se passe quelque chose.
Ça se fait seul. Avec moi. En vis-à-vis. Difficile à dire. Le pressentiment, la sensation, la parole, la forme, les mots se chargent…
Se chargent de matière, d'énergie, de vibration, de contenu

Au fond, du centre, du centre toujours…

Ecriture nouvelle, simple, posée, nue, saine, concise, répétitive, lucide
Une forme nouvelle, épurée
De petites flèches denses et concises, tendues concentrées précises et percutantes.