di 11.05.14

Paris.
météo toujours exécrable. même à midi, devant les fenêtres, nous devons avoir lumière allumée.

marcher, marcher lentement dans les rues, longuement, le vent violent, les grains subits.

modifier sa vision, son toucher, sa réception du monde, l’impact du monde sur soi dans le sens d’une plus grande paix est donc possible. vivre cela plus continûment, plus régulièrement est un ouvrage plus long.
recevoir le monde de façon crue, acérée est une façon de le recevoir pleine de sensibilité vive et d’intensité. mais le recevoir paisiblement est une ouverture, une profondeur, une acuité autre, peut-être bien plus élevée, plus subtile, plus fine encore.

 

ma 13.05.14
Paris.

bien peu de réussite ces temps-ci… et de difficultés autour de moi, pour les amis, pour parvenir à travailler, gagner sa croûte.

la « réussite » qu'est-ce ? n'est-ce pas être en paix ?

La littérature est en germe dans toute situation dont on s’est détaché afin de se la mieux représenter.

Pierre Bergounioux, La cécité d’Homère
conférences à la Villa Gillet, Lyon.

 

ma 13.05.14
Paris.
même plus le temps, la force de noter la météo, le temps qui passe…
et pourtant, toujours, le journal reste le journal du temps…

je me suis toujours éprouvé centré, unifié ces dernières années… là évidemment avec la quantité de remous cette sensation est plus floue, plus aléatoire… pourtant je sais encore à peu près où je veux aller, même si je n’ai pas encore de vision claire des chemins qui ont leur entame ici, ces temps-ci.

au vue des mes investigations actuelles, la situation, la période économique, professionnelle m’apparaît encore plus noire que ce que je pouvais imaginer.

 

je 15.05.14
Paris.

quasi incapable d’écriture : énergie, cerveau trop peu disponibles.
expirer…

on se croit « arrivé »
parfois
avoir trouvé l’équilibre
mais l’équilibre
toujours
est à refaire
par définition

séance de grimpe pour des clients.

 

ve 16.05.14
Paris.
la nuit.

prendre du recul. regarder.
de cette traversée désertique je n’en ai pas tiré encore pleinement profit. il me faut d’abord regarder, écouter plus.
regarder. regarder passer. regarder penser. comprendre.
il me faut, à la fois, être en retrait pour mieux regarder, écouter, comprendre. et à la fois être pleinement connecté.
aux besoins, à mes envies, à mes savoir-faire.
moins plonger dedans tête baissée.
observer d’abord, comprendre.
ce qu’il me faut, ce qui me va. ce qu’il faut, ce qui va aussi aux autres.
ensuite décider. quel chemin tracer, quel chemin prendre.

comme toujours, dans les moments de houle forte, revenir aux fondamentaux…
ce que j’ai de plus précieux, de plus profond : écriture – famille.

notes retrouvées :
je goûte profondément l’exposition et l’interaction publique, par ses possibilités de présence, de partage, mais c’est tout de même un peu une traversée du désert en ce moment de ce point de vue. ceci dit cela n’est pas l’important fondamentalement (et je ne cherche plus la visibilité égocentrée, vaine, à tout prix, non plus que l’actualité coûte que coûte). je mets alors cela à profit pour travailler, écrire… pour poursuivre, plus profondément, une maturation, une conscience qui est l’objet, le fond de mon travail, de mon effort.
cette pratique de conscience, progressive, cette pratique d’une connaissance se veut tout à la fois simple, continue, bienveillante… et l’écriture, outre son travail d’une pâte de langue, de son éperdu questionnement sur notre béance de parole, en est aussi l’outil.
cet effort que je porte, constant, a également sans doute de plus en plus à voir avec « servir ». dans ce sens où tenter de se comprendre mieux, de nous comprendre moins mal, c’est dégager, favoriser nos potentialités d’attention, d’harmonie, de concordance avec soi, donc avec autrui… là où il est si facile d’encourager l’inverse, l’égocentrisme ou le penchant néfaste, pervers, des pulsions collectives, apeurées, d’agressivité, d’oppression, parfois historiquement concentrées en de larges groupes socialisés par la violence.
c’est que nous avons cette conscience, unique probablement ou quasiment dans le règne vivant, de notre finitude… qu’elle génère la peur constitutive, l’inquiétude intrinsèque, intuitive, fondamentale, (con)substantielle à notre lucidité, notre lourde clairvoyance.
et cette inquiétude, se diffusant, préside alors à beaucoup de nos pulsions de défense, de défiance, de méfiance de l’inconnu, du non maîtrisable, de l’autre… alors qu’il est, avec cette même conscience, moyen, avec quelques efforts dépassant le pulsionnel et la peur, d’en faire un usage raisonné, un allié clair et transparent, puissant, d’un calme et d’un un peu plus sage discernement.
ce mûrissement c’est participer, contribuer à comprendre, à étendre, à désencombrer une écoute fine du monde, et de notre humanité dedans, en tant qu’entité globale, interdépendante, et, accessoirement, d’une existence statistiquement miraculeuse (ce que nous démontre la cosmologie).

in Refonder -peut-être impossible
17.03.13

j’écoute le silence. et cela me fait un bien fou.

 

di 18.05.14
Poitiers. Paris.

retour de fête pour l’ouverture du bel et nouvel atelier de J.

 

le creux est tout de même balaise depuis un an, et ces derniers mois… pas sûr de pouvoir remonter aussi haut qu’avant… et pourtant et pourtant…

heureusement, l’assise forte familiale.
et il faut donc d’autant plus bosser le disque au micro de millimètre.

ce sont donc ces jours-ci le point le plus bas.
le fond de vallée, et toute la lande devant, vaste, ondulante, inexplorée, inconnue encore…
le point le plus bas. suis nu.
mais…
ça repartira je sais, la roue toujours tourne…
et j’ai encore à dire. à dire tout doucement.

la traversée du désert. mais le désert est le ferment de ce qui va venir. la source nue de ce qui va poindre, ensuite, plus tard. une force simple, pauvre, dépouillée mais puissante. au premier orage la vie va revenir violente, vivace, surgissante… et le germe est là, déjà.

c’est comme un grand silence, triste, mais où aussi se recentrer sur les profonds fondamentaux.
de ce désert, de ce silence, je peux en faire un atout considérable, et c’est ce que, déjà, je, lentement, mûris.

pour l’instant se taire, écouter.
méditer.
et faire. doucement. tout doucement.

la respiration est claire.
le plateau nu, la feuille vierge, devant.
et c’est comme un silence…

de ce silence, lentement, lentement, sourdement, chanter…

bousculé, dépouillé, mais au-dedans, en-deçà, en profond, comme un calme, une confiance, quelque chose qui déjà, lentement, si lentement, naît.
l’infime vibration est là.

 

ce que c’est (que) de vivre.

 

rire…

 

lu 19.05.14
Paris.
grand beau avant le très mauvais nous annonce-t-on…

disque : 7 morceaux écrits sur 10 prévus.
ce murmure c’est l’un des cœurs de tout ce que je fais aujourd’hui. là où je trouve ma voix, suis au creux de moi, doucement, touche les choses, lentement.
c’est une toute petite chose encore, qui murmure.
et qui me sauve.

 

les choses passent
toutes choses

et on se demande
si laisser couler ainsi…

mais ça ne sert à rien
de se demander
puisque
les choses
tout de même couleront
ainsi.

 

comment l’on peut se consumer de désirs inaboutissables…

la parole claire
et faire/sortir des petits poèmes simples, voire simplement drôles.

 

il n’est pas sûr que le rire sans à propos puisse être.

 

me 20.05.14
Paris.
jour gris, ciel très plombé.

Etant donné que nous n'avons a priori que peu de marge pour un développement physiologique, dont un gain de volume cérébral, de notre type humain, et que nous avons guère changé dans les grands caractères fondamentaux depuis bien longtemps (station verticale acquise et qui n'a que peu de raison de changer dans un avenir proche, libération de la main par cette station et par le langage, libération et accroissement du volume du cerveau, outil, langage… cf Leroi-Gourhan), probablement est-ce pour cette raison-même que nous nous dirigeons actuellement vers des prolongements extérieurs de notre intelligence : outils de confection, de calcul, de prévision, d'intelligence artificielle si ce n'est de pensée, réalité augmentée... outils extérieurs donc qui nous permettraient d’augmenter nos capacités internes désormais peut-être limitées. ce serait donc dans un prolongement artificiel de notre corps que la suite, l'évolution, la trajectoire de notre espèce se jouerait. espèce capable de se projeter, nous ne le savons depuis longtemps, mais désormais sommes-nous peut-être dans une nouvelle forme de cette projection, concrètement prolongée par des objets qui ne seraient pas simples outils mais outils dotés de capacités de se modifier, d’évoluer pour nous-mêmes, voire par eux-mêmes.
peut-être alors, plus tard, beaucoup plus tard, ces objets travaillant pour nous, sans nous, serons-nous amenés vers une forme physiologique produisant exclusivement de la pensée, et aux membres et parties motrices atrophiées en conséquence…

si l'on parle de « sentir, ressentir » c'est bien que la zone régulatrice d'une grande partie des émotions, la zone affective dirons-nous, est celle qui ancestralement gérait les données olfactives chez les vertébrés inférieurs (rhinencéphale dans le cortex pré-frontal).

 

je 22 et ve 23.05.14
Paris.

élagage. abattage d’un robinier par démontage. 1,5 tonne de bois tombé (après les 2 tonnes du précédent chantier), en rétention : chaque section coupée étant retenue par un système de cordes pour dépose au sol. puis évacuation du bois.

au soir, puissante et douce fatigue physique.