09.11.13
Isère, Charantonnay.
temps assez clair.
je récupère, je dors.
puis élagage d’un arbre avec le paternel.
10.11.13
Isère, Charantonnay. Paris.
pluie.
en famille.
retour à Paris en soirée.
11.11.13
Paris.
beau ciel clair et frais.
j'aime ce froid qui arrive doucement, ce froid de la respiration claire.
fête pour le prix Wepler dont la mention spéciale est attribuée à Philippe, j'aurais vu ce qu'est ce genre de réunion, d’agitation. discours précis, digne, de Marcel Cohen pour le prix qu’il reçoit.
Marcel Cohen qui cite :
Sans la littérature on ne saurait pas ce qu'un homme pense seul dans sa chambre.
Georges Perros
12.11.13
Paris.
ciel blanc. puis pluie, pluie continue, fine, grosse, pénétrante, tenace.
Tenter de reconstituer ce qui, en deçà du langage, dans le ressassement interne, peut encore être communiqué à autrui.
Georges-Arthur Goldschmidt
cité en exergue in « Sur la scène intérieure. Faits » de Marcel Cohen
multiplication des attaques racistes dans le discours publique, l’expression de certaines personnes buvant toute honte, laissant désormais, à nouveau, émerger touts leurs nauséabonds ressentis, car si ce sont peut-être des pensées ce ne sont pas pour moi des opinions à proprement parler, et tout du moins des pensées dans l’erreur (physiologique, anthropologique, ontologique).
une colère immense monte en moi.
lecture de Bourdieu « le sens pratique », écoute de conférences de Badinter…
érotisation du rapport de scène.
13.11.13
Paris.
grand ciel dégagé.
au réveil, toujours dans l’immense colère contre ceux qui profèrent, multiplient, laissent sortir leurs propos racistes… je tente d’écrire là dessus, dans toute la complexité de tels phénomènes, au milieu de la grande fatigue et des autres travaux à mener… j’essaie de me concentrer là-dessus plus que sur toutes autres écritures, car je ressens une urgence de parler.
14.11.13
Paris.
pluie d’automne.
au lever, je continue à écrire sur la dérive raciste, tenter de comprendre, d’expliciter ses causes. de la nécessité de parler désormais !
puis je donne mon cours à la Sorbonne avec entrain.
15.11.13
Paris.
soleil.
le « casque » au matin, la soirée ayant été arrosée.
toujours à écrire cette foutue colère, que je finirai par publier tard en soirée.
cela m’a pris une énergie considérable, celle de la colère mais à centrer sur un objectif, et celle nécessaire pour être précis, clair, percutant, tout en évitant consciencieusement de se tromper d’ennemi.
je ne me tairai plus.
Aujourd'hui je n'ai rien fait.
Mais beaucoup de choses se sont faites en moi.Roberto Juarroz
XIIIième Poésie Verticale, José Corti
16.11.13
Paris.
le froid progresse très régulièrement depuis plusieurs semaines.
de cette façon dont une même voix s’exprime différemment selon qu’elle se porte dans un poème, par de la prose, au creux d’un journal, en un article, ou à voix haute… et pourtant cette voix, malgré ces variations tonales spécifiques qu’elle garde à l’intérieur de chacun des différents statuts évoqués ici, reste même.
ce sont les mois sombres. marcher au soir dans la nuit noire, la ville, le froid… prendre du temps pour soi…
je regarde d’anciennes émissions d’apostrophe avec Duras, puis avec Etiemble se nommant lui-même « l’emmerdeur », avec Dumezil ensuite…
17.11.13
Paris.
On a donné de l'oxygène aux mécanismes du cerveau reptilien. Lequel n'aiguise que trois forces aveugles : attaque, défense, souffrance. Dès lors, l'argument n'a plus d'importance, on ne discute plus d'idées, on n'a plus les moyens de le faire.
Patrick Chamoiseau
Le Monde du 16 novembre 2013
visionnage de plusieurs autres émissions avec Bourdieu, dont une le réunissant avec Braudel et Gallo.
cette sensibilité à cru, ou accrue, presque blessure peut-être, sans doute « biographique » et due à son itinéraire au travers des classes sociales entre son origine dite « modeste » et son « ascension », cette sensibilité crue donc que je sens chez lui, qui l’amène à être dans une rugosité de la lutte, en-deçà, en amont de la démarche scientifique me semble-t-il… mais je ne dénie absolument pas la tentative d’objectivité, ou en tout cas comme il le dit lui-même d’objectiver l’objectivité, ce qui dit bien là la tentative vers cela et non l’accomplissement. il reste que son œil est extraordinairement perçant.
18.11.13
Paris.
le froid continue à gagner progressivement…
dans le mot que Didier Bourda m’envoie, ce terme de : « langagement ».
je n’ai pas touché à bref depuis 12 ou 13 jours, hormis 2 ou 3 ajouts d’éléments très succincts… je préfère le laisser au repos, fonctionner ainsi ce coup-ci : m’efforcer plusieurs jours durant, puis laisser reposer, y revenir ensuite avec le bénéfice d’un très léger recul…
écoute, regarde le temps couler, sais-je faire ?
19.11.13
Paris.
6 degrés à 9 h 30.
il fait froid dans la maison, car nous chauffons à peine…
Que la grammaire nous impose de choisir entre présent et passé m’a toujours fasciné parce que, dans la vie, il n’y a pas de réelle frontière entre ces deux temps. Elle est largement arbitraire. Walter Benjamin estime d’ailleurs qu’il n’existe qu’un seul temps : le présent. Il parle de « présent du passé » et de « présent du présent » (et aussi de « présent du futur »). Dans un livre, j’utilise en effet l’image d’un petit garçon dont la mère agite la main sur le quai tandis qu’il s’éloigne. D’un seul coup, l’enfant comprend qu’il doit parler au passé sous le seul prétexte qu’il ne voit plus sa mère. Cependant, elle est toujours sur le quai et, si la ligne était droite, il la verrait encore. À la fin de la Recherche du temps perdu, dans Le Temps retrouvé, Proust fait l’expérience étrange de ne plus distinguer le présent du passé. Le passé est revenu avec une telle force, et d’une manière tout à fait fortuite, qu’il voit les choses à la fois dans le passé et dans le présent. Il ajoute même que c’est le présent qui donne son vrai sens au passé. Ce dernier n’est donc jamais terminé. Tout cela me trouble beaucoup.
Marcel Cohen
entretien avec Nathalie Jungerman
Florilettres 149, novembre 2013
je travaille à l’article pour l’atelier de géopoétique portant sur « l’attachement », l’attachement à la terre, à nos racines… du fait que nous ayons les pieds ancrés en terre, comme en nos ascendances… que nous soyons faits de ce lien, inaliénable s’il en est.
j’y travaille au matin tôt, l’après-midi rien n’est possible. le soir je peux en général m’atteler de nouveau à la tâche… question de biorythme, et de courbe des sollicitations extérieures.
puis qu’écrire ? que faire ? je suis las… journée étrange.
revenir plus précisément à la méditation, dans laquelle je pourrais avancer plus loin.
je vérifie le matériel d'escalade, élément par élément, le marque, dans le froid du garage... de ce travail d'artisan dont le labeur ne nourrit plus qu'à peine son homme, comme pour bon nombre de petites entreprises.
on s'arrête avec S pour goûter ensemble et discuter un peu.
je continue mes lectures de Bergounioux.
à la douche, première fois que je constate de légers plis qui se sont formés au-dessus des genoux : l'âge avance donc bel et bien...
toutes ces lectures, écritures, pour tenter de comprendre mieux, moins mal…
20.11.13
Paris.
2 degrés à 7 h 30.
méditation : la vitesse de distraction, de dispersion du cerveau est phénoménale, presque redoutable. la grande difficulté à se centrer, par exemple sur la respiration, et tout à la fois de laisser couler, glisser ; d’être centré en définitive sur l’écoulement… j’ai un peu l’impression de débuter à nouveau ces temps-ci, après pourtant 6 à 7 ans de pratique.
se construire sur l’abandon, ne pas être toujours pris par le désir, l’élan fonceur, ailleurs (même si cela présente aussi de nombreux avantages), est d’une très grande difficulté pour un profil psychique comme peut être le mien.
peut-être que 2014, après une année de « non », sera année de « oui »…
il est besoin soit d’une relance, soit de refonder : ce sera soit le terrain, soit le choix à faire, de l’année prochaine.
mais il ne s’agit pas de refonder « l’activité », par une nouvelle activité voire un activisme. c’est justement en-deçà qu’il faut aller vers une « évolution », bien plus justement qu’une refondation. en-deçà c’est-à-dire au plan de l’appréhension du monde, compris dedans mon psychisme profond. pourquoi toujours, presque toujours, cette avidité ?
le titre Refonder apparu quand ? son apparition correspond-elle à une période précise ?
après recherche : apparu en 2002 visiblement, au sommet d'une période « haute ».
temps clair, froid, puis la pluie, froide…
la neige sur le sud du pays, en-dessous de Lyon. chez mon père ils resteront 36 heures sans électricité, c’est-à-dire sans chauffage (la chaudière à bois ayant des circulateurs électriques), et sans lumière, sous 30 cm de neige.
chantonner un peu.