Je me suis consciencieusement aculturé ces dernières années de toute cette culture qu'il fallait avoir, pour retourner à de plus bruts savoirs. Puis, depuis quelques temps, à des savoirs exotiques pour nous occidentaux. Peut-être est-il temps désormais de ré-enrichir à nouveau les bagages d'objets quelque peu plus implexes et civilisés (quand vus d'ici - ironie).
A relire Bouvier, je m'aperçois que si je me suis rapproché des sensations fondamentales, c'est entre autre par ce désapprentissage (réactif ?) de ces vieilles habitudes de tout penser, de ces vieux savoirs (historiques, étymologiques…) que je dis civilisés, qui étaient pour moi trop "empleins" de codes socio-culturels, trop issus d'un milieu qui se cultive que je trouvais fermé et autocentré, peu imprégné de la relativité essentielle que nous apportent la diversité et la réalité des points de vue.
Je ne suis pas certain que cela en soit le lieu ici, mais peut-être faudrait-il ici aussi parler de ce que j'ai appris par le creusement de mes racines terriennes d'une part, et d'autre part, par la rencontre avec la respiration et le yoga tout d'abord, puis avec la méditation — pratiquée depuis, chaque matin, au réveil, accompagnée d'un thé fumant, toute fenêtre ouverte quelque soit le ciel —. Par la découverte de ces savoirs multimillénaires — de ceux qui me touchent : venus du haut Tibet pour la plupart —. De ce que je découvre de possibilité simple de paix, de construction par l'abandon, d'ouverture à la compassion, d'évidence du moins de peur face à mourir, pour le très actif et très pressé occidental que je suis. Il serait bien difficile en quelques mots de dire tout cela, et pourtant ces quelques mots déjà pourraient suffire aussi.
C'est une autre voie que le cheminement d'écrire — quoique, deux fois quoique — en tout cas ça ne peut être appelé une "recherche", un "travail", ou je ne sais quelle "analyse", puisque c'est déjà là, d'évidence, juste à laisser diffuser… c'est alors que l'on se rend compte à quel point l'abandon — terme le plus souvent péjorativement perçu — est non seulement un vaste apaisement, mais aussi et peut-être surtout, une radicale respiration en soi, et vers les autres… c'est tout sauf cette idée d'ici d'abdiquer, mais bel et bien réelle et nouvelle et saine construction, venue d'en elle-même. Une sorte de "force", de courant, de très ancien limon redécouvert, déjà là, ancien, assis et façonné en dehors de cette idée de force, d'effort, de recherche et performance, qui fait succès chez nous.
Tout cela est plus que brièvement dit. Mais dit publiquement pour la première fois.