(vers 1990)

Comme quand j'écris, fluides, faciles à dire... Nos phrases pareilles. Ce qui, dans le flot, coule, transporte, sans accident, emmène... (dans un fluide, un courant continu de fleuve régulier, qui le transporte sans accident, l'emmène, flottant, sur cette dérive régulière, ce " stream " continu)... infléchies jusqu'à une perte de souffle presque, jusqu'à leur perte presque... mais maintenues, au fond, latentes... retenant, couvant déjà la suite... et puis, en bout de phrase, au bout, nous choppe. Comme ici.
Nos phrases pareilles.

Lorsqu'on en est là à la musique, à l'affinage du style, à l'affinage du sens, il me faut (m')écouter pour résoudre les hésitations. Poser ce qui, dans le flot, coule le mieux, tient la musique, dans le rythme, soutient le mélodique, le porte et, à la fin, le fait fléchir, l'infléchit jusqu'à une perte de souffle presque, jusqu'à sa perte presque... mais maintenue, au fond, latente... retenant, couvant déjà la suite...
Souvent je m'efforce de faire des phrases fluides, légères, faciles à la lecture, qui n'y fasse pas trop d'accrocs, pour emmener le thème, le lecteur dans un fluide, un courant continu de fleuve régulier, qui le transporte sans accident, l'emmène, flottant, sur cette dérive régulière, ce stream continu… et puis, en bout de phrase, de paragraphe, de partie, le choppe. Comme ici.
Le sujet importe peu, c'est la façon de le pénétrer.

(Il faut) styliser, nourrir, émouvoir. Rendre le texte autonome, autonome de l'auteur /moi, en l'intensifiant, le grossissant, lui donnant du sang jusqu'à ce qu'il soit loin, détaché de moi. Maintenant que tout est écrit, il va falloir le travailler, l'amoindrir, le regrossir jusqu'à ce que la pâte soit maléable et souple. Le sortir du récit (le sortir de moi), jusqu'à ce qu'il soit autonome, en lui insufflant une fiction, (une amplification) mais une fiction qui ne soit pas seulement une fiction d'anecdotes mais une fiction, un surplus de matière, de style, de gouaille, de poésie, d'émotion. (Lui donner du caractère) pour qu'il s'échappe de lui-même, devienne autonome, dise par lui-même et non pas par la patte trop présente de l'auteur. Par trop d'intentions.